Une maison d’édition peut-elle être rentable ?

Dans l’imaginaire de beaucoup de personnes, le monde de la littérature est une sorte d’univers semi-mystique, peuplé d’auteurs fiévreux – et sans le sou – et de vampires – soit les maisons d’édition… Bon, j’exagère un peu tout de même.

Les pratiques des structures éditoriales sont une chose, leur rentabilité en est une autre.

 

Certes, parler du livre comme d’un produit à part entière fait grincer quelques dents aux amoureux de la littérature.

Mais, même si un roman ne peut pas se comparer à une boîte de sardines, il a un coût de production, un prix de vente et un coût de revient… exactement comme nos sardines ! Et de toute façon, c’est très bon, les sardines, avec tout plein de minéraux et de… ah, je m’égare.

 

Il y a en fait plusieurs mondes dans la communauté des maisons d’édition, avec deux extrêmes : les grandes structures, les « majors », dont quelques auteurs sont des producteurs de best-sellers ; et les petites, les poissons-pilotes qui tirent plus ou moins bien leur épingle du jeu.

 

La plupart des auteurs débutants s’imaginent ces « majors » comme des vaisseaux amiraux, dont les sièges sont des bâtiments haussmanniens sis dans le vingtième arrondissement de Paris, surfant sur des fortunes gigantesques générées par lesdits auteurs de best-sellers.

Mais ce n’est pas si simple...

Bien sûr, un éclatant succès en librairie mettra du beurre dans les épinards des « majors », mais leurs plus grosses entrées financières viennent souvent d’autres sources, comme la cession des droits pour l’audiovisuel, les produits dérivés ou l’immobilier. Et les revenus générés par leurs auteurs vedettes vont surtout servir à financer la publication des livres des autres auteurs de leur catalogue, bien moins célèbres et rentables.

 

La plupart de ces grandes maisons réduisent leurs coûts autant que possible pour continuer leur activité : il n’y a quasiment plus de comités de lecture professionnels, les services de correction sont de plus en plus souvent assurés par des logiciels spécialisés, etc.

Ce n’est qu’ainsi – grâce à la réduction des coûts de fonctionnement, en diversifiant les sources de revenus et en utilisant les bénéfices issus des ventes des livres-stars pour amortir les coûts de publication des « petits » auteurs – que les grandes structures pérennisent leur activité. Et, parfois, au prix d’une déshumanisation des processus de sélection et de travail éditorial : plus de lecture réelle et complète des manuscrits proposés, plus de correction approfondie, etc.

 

Et les poissons-pilotes, alors ? Eh bien… ils se débrouillent avec les moyens du bord.

Ce n’est pas un métier que l’on choisit pour faire fortune, mais bien par passion. Inutile de rêver partir aux Bahamas avec la caisse : au mieux, vous vous contenterez de Bibiche en Moselle – mais oui, c’est le vrai nom d’un vrai village !

 

Les petites maisons – comme la nôtre, dont le statut est associatif – ne recherchent généralement pas la rentabilité, mais le simple équilibre financier, qui n'est déjà pas garanti. Elles essaient donc aussi d’optimiser leurs coûts internes, mais elles n’ont, bien sûr, pas les mêmes moyens que les grandes.

Mais, parce que nous faisons ça par passion, il est impensable pour nous de ne pas utiliser nos yeux et notre cerveau pour évaluer, analyser et corriger les textes !

 

Reste une constante, pour les vaisseaux amiraux comme pour les poissons-pilotes : une maison d’édition peut être rentable, mais surtout quand elle tire ses revenus d’autres sources que les textes qu’elle publie. Vous avez dit bizarre ?

 

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